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Unité Magistrats FO

Justice de protection et mineurs non-accompagnés (MNA)

Etats Généraux 17/01/2022

Justice de protection et mineurs non-accompagnés (MNA) - Syndicat Unité Magistrats SNM FO

États généraux de la Justice

Groupe de travail « Justice de protection »

 

Contribution UNITÉ MAGISTRATS SNM FO

 

Justice de protection et mineurs non-accompagnés (MNA)

 

Le sujet des mineurs non-accompagnés (auparavant appelés « mineurs étrangers isolés puis « mineurs isolés étrangers » (cf rapport DEBRE), leur dénomination ayant changé pour souligner l’idée de protection et écarter l’aspect «étranger en situation irrégulière ») ébranle l’ordre public français voire européen.

Les acteurs de la justice se retrouvent au centre d’une problématique politique aux ressorts sociaux, économiques, voire sanitaires inédits.

Le problème des MNA s’inscrit dans un contexte d’immigration de la jeunesse étrangère1 (impulsé dès 2010 par les conflits révolutionnaires en Afrique du Nord et aggravé en 2015 par les guerres du Moyen-Orient) :

  • Afflux croissant de mineurs étrangers surreprésentés par les hommes : 16 760 MNA entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2019 (17 022 en 2018, 14 908 en 2017 et 8 054 en 2016) pour95,5 % de garçons.

  • Âge avancé des mineurs (proche de la majorité) : plus de 44,39 % ont 16 ans, 25,75 % ont 15 ans et 14,28% ont 17 ans (en outre, 1,86% ont moins de 12 ans (c’est-à-dire 150 dont 21 ont moins de 10 ans)).

  • Provenance majoritaire (en 2019) de trois pays d’Afrique : Guinée, Mali, Côte d’Ivoire (environ 63%). Aussi, du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie, environ 10%). En outre, d’Asie (Bangladesh, Pakistan, Afghanistan), d’Albanie et du Sénégal. À noter, un flux migratoire nouveau venant du Bangladesh (nouveau flux avec le Nigéria). Cette immigration est causée par effets des conflits internes ou régionaux, du dérèglement climatique et de l’indigence.

  • Changements des politiques de pays de l’Union européenne : notamment la Hongrie et l’Italie qui ralentissent les flux de l’Est depuis 2019, avec pour conséquence que les arrivées en Europe se font principalement par l’Espagne (selon l’Organisation Internationale des Migrations).

Face à cette crise migratoire, les enjeux sont multiples :

  • Protection de l’enfance (CIDE)

  • Finances publiques

  • Ordre public

Il s’en est suivi une mutation de la politique de la protection de l’enfance et du rôle des autorités judiciaires qui y sont étroitement associées à partir de 2016.

Plus précisément, l’enjeu fondamental est la détermination de ceux qui sont des MNA (l’évaluation de la minorité et de l’isolement est la clé de voûte de la mission MNA2) et ceux qui ne sont pas des MNA (qui iront en centre de rétention pour être potentiellement expulsés) : la minorité conditionne la mobilisation d’un régime juridique spécifique, protecteur et coûteux.

De cette problématique découle divers enjeux, liés à la prise en charge complète ou temporaire des jeunes concernés et à la délinquance liée.

A cet égard, le CJPM ( code de justice pénale des mineurs) pose question.

Trois thématiques principales doivent être identifiées :

I. Le rôle accru des autorités judiciaires en matière de protection des MNA

A. La détermination complexe de la minorité par les acteurs de la justice

B. De la prise en charge administrative des MNA par les Départements à la prise en charge judiciaire par les magistrats spécialisés

II. Les autorités judiciaires à l’épreuve de la délinquance des MNA

A. Une délinquance transnationale : entre réseaux illégaux et absence de coopération internationale

B. De l'essoufflement de la politique pénale des mineurs à l'inapplicabilité de la réforme de la justice pénale des mineurs aux MNA

III. Un financement exponentiel pour un résultat insatisfaisant

I. Le rôle accru des autorités judiciaires en matière de protection des MNA

 

A. La détermination complexe de la minorité par les acteurs de la justice

Les acteurs de la justice s’appuient sur une panoplie d’outils issus du régime relatif à « l’évaluation des modalités d’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille ».

La position institutionnelle relative au recours à l’examen radiologique d’âge osseux est insatisfaisante

En France, la minorité permet de bénéficier d’une protection particulière (régime juridique spécifique).

La loi du 14 mars 2016 introduit dans l’article 388 du Code civil le recours à un examen radiologique d’âge osseux, ordonné par un magistrat. Ce moyen de déterminer la minorité d’une personne se disant MNA est subsidiaire (en cas d’absence de documents d’identification valables).

Cet outil est vivement critiqué du point de vue de sa fiabilité et des questions de dignité humaine. Étant donné qu’il touche aux libertés individuelles, dont le magistrat est le gardien au sens de l’article 66 de la Constitution, il est logique que ce soit les magistrats qui interviennent pour la mise en œuvre de cet outil aidant le conseil département à établir la minorité.

Dans une décision n° 2018-768 QPC du 21 mars 2019, le Conseil constitutionnel consacre l’exigence de l’intérêt supérieur de l’enfant fondé sur les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution de 1946, au nom de la protection de l’enfance. Les Sages soulignent que cet examen contient toujours une « marge d’erreur significative », portée sur le compte rendu médical. Les conclusions de cet examenne peuvent déterminer à elles seules la minorité de l’intéressé.

Au surplus, le refus de se soumettre à cet examen ne peut s’analyser comme un aveu de majorité.

Il en résulte une présomption de minorité au profit de la personne se prétendant MNA qui déclenche automatiquement un dispositif de protection.

La Cour européenne des droits de l’Homme (affaire SMK contre France du 15 mars 2019) ordonne la mise à l’abri immédiate d’une MNA après le refus de prise en charge du conseil départemental qui avait mené son évaluation.

Il convient de remettre les choses en perspective. La protection des mineurs passe aussi par la distinction entre les véritables mineurs et ceux qui se prétendent tels. L’amalgame entre les deux catégories fait courir un danger aux mineurs les plus fragiles et qui nécessitent une protection, étant rappelé que tous sont accueillis dans les mêmes structures. Pire encore, cette incapacité de discrimination entre les uns et les autres aboutit à une déperdition de moyens financiers au préjudice des publics légitimes de la protection de l’enfance, étrangers en situation irrégulière ou pas.

Notre organisation préconise :

  • de rendre obligatoire le test osseux ou tout examen médical ou biologique en vue de l’établissement de la minorité

  • de prescrire que le refus de se soumettre à cet examen emporte présomption simple de majorité

L’appui du fichier d’aide à l’évaluation de la minorité est limité :

Le décret n° 2019-57 du 30 janvier 2019 (pris en l’application du nouvel article L. 611-6-1 du CESEDA crée par la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 (sur l’immigration et le droit d’asile)) introduit le déploiement national progressif du fichier d’appui à l’évaluation de la minorité (AEM, vu les articles R. 221-15-1 et suivants du CASF). Il permet d’identifier ainsi que de protéger les personnes mises à l’abri se présentant comme MNA (éviter le nomadisme des réseaux) et de lutter contre les séjours irréguliers.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2019-797 QPC du 26 juillet 2019, a déclaré conforme à la Constitution l’article L. 611-6-1 du CESEDA permettant le fichage biométrique.

Le conseil départemental peut demander à la préfecture de recevoir la personne se déclarant MNA à chaque étape de l’évaluation pour contribuer à son identification (article R. 221-11 alinéa 5 du CASF). Elle est reçue à la préfecture pour la collecte de données personnelles dans le fichier d’AEM et avec le soutien additionnel des fichiers « AGDREF » et « VisaBio » (utiles pour la démarche d’évaluation, voir l’article R. 611-8 du CESEDA).

Or, fin 2019, 15 départements ne pouvaient pas encore consulter le fichier d’AEM. En outre, il n’a pas vocation à être utilisé une fois que le mineur a été placé à l’ASE, après ordre donné par le juge des enfants3.

Le Conseil d’État juge légal le décret4 du 30 janvier 2019. Afin d’éviter des interprétations abusives, il précise que l’étranger se déclarant mineur doit faire l’objet d’un accueil provisoire d’urgence dans l’attente de son évaluation, qu’il ne suffit pas qu’un jeune apparaisse comme majeur dans l’une des bases consultées en préfecture pour qu’il soit évalué comme majeur (de même, le département ne peut pas déduire la majorité de l’étranger de son seul refus d’aller en préfecture) et, notamment, que le fichier d’AEM sert à l’évaluation et ne comporte pas de finalité pénale5.

Nous préconisons de généraliser l’usage de ce fichier et de le rendre accessible dans les plus brefs délais et au maximum dans les 5 jours.

B. De la prise en charge administrative des MNA par les Départements à la prise en charge judiciaire par les magistrats spécialisés

Les dispositions majeures sont celles de l’article R. 221-11 du CASF et de l’article 375-5 du Code civil. Les MNA reconnus sont pris en charge par l’ASE et répartis selon la clé de répartition publiée par le ministre de la justice.

Des investigations initiales dans l’urgence :le président du conseil départemental du lieu où se trouve une personne se déclarant MNA met en place un accueil provisoire d’urgence de 5 jours durant lequel il procède aux investigations nécessaires pour évaluer la situation de l’intéressé (isolement et minorité) grâce aux :

  • informations que peuvent, à sa demande, lui fournir les préfets de département et de police.

  • enquêtes et entretiens menées par les services de police et le secteur associatif.

  • examens biologiques réclamés par l’autorité judiciaire au titre de l’article 388 du Code civil.

Des notifications doivent se faire pour information : le résultat de l’évaluation est notifié aux préfets. De même, en cas de saisine de l’autorité judiciaire par l’intéressé s’il a été évalué majeur.

La prise de décision au terme du délai de 5 jours ou de l’évaluation :

Si le président du conseil départemental estime que la situation de l’intéressé ne justifie pas la saisine de l'autorité judiciaire, il notifie à cette personne une décision de refus de prise en charge. En ce cas, l'accueil d'urgence prend fin.

Des recours sont possibles.

Dans le cas contraire, il saisit le procureur de la République en vertu de l'article 375-5 alinéa 2 du Code civil. Ainsi, en cas d’urgence, ce dernier peut, à l’instar du juge des enfants, ordonner la remise provisoire du mineur à un centre d’accueil ou prendre une mesure prévue par les articles 375-3 et 375-4 du Code civil, à charge de saisir dans les 8 jours ledit juge, qui maintiendra ou modifiera la mesure. En ce cas, l'accueil d'urgence se prolonge jusqu’à la décision de l'autorité judiciaire.

En ce dernier cas, le procureur ou le juge demande au ministère de la justice de communiquer, pour chaque département, les informations permettant l'orientation du mineur concerné.

La décision est fondée sur l'intérêt de l'enfant, avec la garantie de modalités d'accueil adaptées.

Les juges peuvent saisir la cellule nationale en vue d’une proposition d’orientation (451 sollicitations du juge des enfants).

2 377 mesures de placement à l’ASE ont été prises sans cette saisine (81 % des décisions prises sans sollicitation de la cellule nationale et 19 % après avis)6.

II. Les autorités à l’épreuve de la délinquance des MNA

A. Une délinquance transnationale : entre réseaux illégaux et absence de coopération internationale

Les MNA en lien avec des réseaux de type mafieux :

La PJJ s’implique spécialement en matière de traite des êtres humains (TEH) et d’asile (second plan d’action contre la TEH 2019-20217, travail sur un guide pour l’identification, la prise en charge et l’orientation des MNA victimes de TEH dans laquelle les victimes filles sont plus exposées – promotion du droit d’asile).

Les MNA, arrivés en France, souvent, à Paris (et dans d’autres villes de province comme Bordeaux) sont facteurs d’insécurité et de délinquance : vols avec violence, trafic/consommation de stupéfiants, cambriolage.

Le procureur de la République de Paris communique régulièrement sur ce sujet.

Le nombre des MNA déférés devant les tribunaux judiciaires est en hausse constante, par exemple à Bobigny ; 341 sur 2339 mineurs en 2018 (soit 14,57%), 423 sur 2484 mineurs en 2019 (soit 17%), 269 sur 1260 mineurs au 30 septembre 2020 (soit 21,34%).

Des tentatives de résolution de la délinquance des MNA via une coopération entre la France et les pays d’origine des MNA

Pour résoudre la délinquance des mineurs étrangers isolés8 qui seraient d’origine maghrébine, une coopération policière opérationnelle entre les ministères de la justice et de l’intérieur français et marocains a été engagée dès 20189 et relancée en décembre 2020.

Un projet du ministère de l’Intérieur et de la direction générale des étrangers en France relatif à l’aide au retour volontaire de MNA dans leur pays d’origine, financé par le Fonds Asile Migration Intégration de l’Union européenne, a été engagé mais sans aucun succès.

La PJJ conduit en 2020 un groupe de travail visant à recueillir les besoins en matière de prise en charge des MNA dans le cadre pénal par des professionnels.

B. De l'essoufflement de la politique pénale des mineurs à l'inapplicabilité aux MNA de la réforme de la justice pénale des mineurs

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté a pu constater, d’une part, que certains lieux ont connu une augmentation de 50 % de MNA détenus (incarcérés faute de domicile et de garanties de représentation) et, d’autre part, l’état de santé dégradé des MNA dans le cadre pénal (en plus d’une recrudescence d’actes auto-agressifs)10.

L'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs prise sur le fondement de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et ratifiée par la loi n°2021-218 du 26 février 2021 a abouti à l'entrée en vigueur depuis le 30 septembre 2021 du code de la justice pénale des mineurs.

La réforme de la justice pénale des mineurs a pour objectifs  :

  • La clarification et simplification de la procédure pénale concernant les mineurs, souhaitées par les professionnels (magistrats et éducateurs), les mineurs concernés ainsi que leur famille.

  • Une réponse éducative plus efficace grâce à une justice plus réactive par la réduction des délais de jugement, considérés trop long par les professionnels, les mineurs concernés ainsi que leur famille (selon les pédopsychiatres, le jeune a besoin de travailler rapidement, avec les éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse (PPJ) et les magistrats, sur une prise de conscience de l’acte qu’il a commis), la société (qui est en droit d’exiger une réponse judiciaire célère) et la victime (qui veut être indemnisée le plus rapidement possible).

L’ASE gérée par les départements n’a pas pour mission de prendre en charge des mineurs faisant l’objet d’une mesure éducative judiciaire, ils doivent être pris en charge par les services de la PJJ et ce pour éviter un transfert de charge (financière) aux départements.

Avec la réforme de la justice pénale des mineurs, le procès pénal fait l’objet d’une césure comprise entre 3 et 9 mois, exception de l’audience unique.

Cependant, certaines dispositions du Code de justice pénale des mineurs ne s’appliquent pas aux MNA :

  • la responsabilisation des parents

  • l’indemnisation des victimes

  • la mise en œuvre d’une mesure éducative unique

  • la césure ( faute de garanties de représentation et de réinsertion)

Notre organisation est opposée à la différence des autres syndicats au principe même de la césure car il procède d’une confusion entre le temps de la réponse judiciaire et le temps de la réponse éducative. Cette procédure méconnaît le sens de la peine, distancie la sanction de la commission des faits, rallonge les délais et ne fait qu’illusion sur la prise en charge éducative. Or, rien ne garantit que ce dispositif ne sera pas appliqué aux MNA en dépit du fait qu’ils ne répondent pas aux conditions requises par le CJPM.

III. Un financement exponentiel pour un résultat insatisfaisant

Les crédits consacrés aux MNA (responsables d’un tiers de l’augmentation du nombre d’enfants concernés par la politique de l’ASE) ont augmenté de 674 % entre 2014 et 2016 et de 486 % entre 2016 et 2019 pour atteindre 126,9 millions d’euros à la charge de l’État11. L’article R. 221-12 du CASF prévoit une participation forfaitaire de l’État considérée insuffisante par les départements qui financent majoritairement (un forfait de 500 euros par jeune évalué et de 90 euros par jour de mise à l’abri pour 14 jours maximum puis 20 euros pour 9 jours de plus, des financements exceptionnels peuvent aussi s’ajouter).

Selon le rapport du Sénat sur le projet de la LFI de 2020, les départements attendaient une participation accrue de l'État au financement de l'accueil et de l'accompagnement des MNA au titre de la protection de l'enfance dont voici l’évolution12 :

 

2016

2017

2018

Coût de prise en charge globale des MNA

1 milliard d’euros

1,25 milliard d’euros

2 milliards d’euros

Coût de prise en charge au titre de l’ASE

406,7 millions d’euros (50 000 euros x 8 054 MNA)

745,4 millions d'euros (50 000 euros x 14 908 MNA)

851,1 millions d'euros (50 000 euros x 17 022 MNA)

Coût de prise en charge de l’évaluation et de l’hébergement d’urgence

597,3 millions d'euros

504,6 millions d'euros

1 148,9 millions d'euros

Nombre d'évaluations

20 000

25 000

60 000

À compter de 2021, la participation forfaitaire de l'État est conditionnée à la signature par le président du conseil départemental d'une convention avec le préfet afin de fixer les modalités selon lesquelles l'action des services de l'État et du département est coordonnée en matière d'évaluation et de mise à l'abri des MNA. Si elle n’est pas signée, le montant de la participation forfaitaire de l'État est réduit à 100 euros par personne évaluée. Les crédits de l’État diminuent13 :

 

LFI 2019

LFI 2020

LFI 2021

Montant de la participation en amont (évaluation et mise à l’abri)

74 millions d’euros

115 millions d’euros

103 millions d’euros

Montant de la participation en aval (aide exceptionnelle au titre des dépenses d’ASE)

67,2 millions d’euros

47 millions d’euros

17 millions d’euros

Aux termes du rapport du Sénat, les résultats ne sont pas à la hauteur de l’investissement :

  • Les capacités d’accueil sont jugées insuffisantes (saturation dans des départements, malgré une augmentation des capacités). Aussi, selon la MMNA, peut être constatée l’absence de prise en charge de MNA pourtant confiés par décision judiciaire, surtout une absence de mise à l’abri dans des départements résistants (pour des raisons financières et démographiques, et sociales liées à la crainte de la délinquance juvénile)14, ce qui conduit à déplacer les flux d’arrivées dans d’autres départements. La durée moyenne d’une prise en charge est de 2 ans avec de plus en plus de recours à des hôtels dans certains départements (ce qui pose des problèmes au niveau légal et au niveau des objectifs d’accueil et de réalisation des missions). En 2019, 17 000 jeunes reconnus MNA ont été orientés vers les services spécialisés en vue d’une prise en charge sur un total d’au moins 50 000 demandes15.

  • La Cour des comptes souligne qu’il y a un écart substantiel entre le nombre de jeunes orientés vers l’ASE et, 3 ans plus tard, le nombre de ceux qui forment une demande de titre de séjour (sur 33 985 MNA orientés sur les années 2014 à 2017, seules 18 918 demandes de titres de séjour émanant d’ex-MNA ont été déposées en préfecture de 2016 à 2019).

    Ce hiatus résulte de la difficulté à produire des documents d’identité en temps utile et illustre l’insuffisance du suivi et d’anticipation16.

  • Selon l’Institut national d’études démographiques (INED), parmi les jeunes placés âgés de 17 ans en 2013, 95 % des MNA avaient bénéficié d’un contrat jeune majeur (augmentation du nombre de MNA mais pas de contrats)17.

  • La Cour des comptes a recommandé de : « préparer l’avenir des jeunes protégés en organisant un entretien systématique avant 16 ans, en favorisant les parcours de formation et d’insertion au-delà de 18 ans et en accompagnant si besoin leurs projets au-delà de 21 ans, et assurer un suivi exhaustif de leur devenir postérieurement à la prise en charge »18.

Un projet de création d'un programme dédié à l'évaluation et l'hébergement d'urgence des MNA est en cours et, plus généralement, une stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020-202219 (accompagnement vers l’autonomie) est engagée.

UNITÉ MAGISTRATS déplore l’emploi à fonds perdu de deniers publics sans état des lieux préalable, ni définition d’une politique éducative ou répressive interministérielle sur la prise en charge des MNA.

PROPOSITIONS UNITÉ MAGISTRATS SNM FO

Proposition n° 1 : Centraliser la politique de prise en charge des MNA par un pilotage étatique et la désignation d’un délégué interministériel.

Proposition n° 2 : Rendre obligatoire toute expertise (médicale, biologique, génétique…) pour déterminer la minorité.

Proposition n° 3 : Considérer que le refus de se soumettre à l’un de ces examens ou à toute mesure d’identification emporte présomption simple de majorité.

Proposition n° 4 : Élaboration systématique d’un parcours rigoureux de formation et d’insertion des MNA sous le contrôle des Départements.

Proposition n° 5 : Rationaliser l’emploi des fonds publics en mettant en cohérence les politiques départementales et nationales de prise en charge des MNA.

Proposition n° 6 : Relancer le projet du Ministère de l’intérieur et de la direction générale des étrangers en France relatif à l’aide au retour volontaire de MNA dans leur pays d’origine, financé par le Fonds Asile Migration Intégration de l’Union européenne.

 

Revue de presse sur les mineurs non-accompagnés :

  • Public Sénat : « Délinquance : la justice « impuissante » face aux mineurs non accompagnés, selon le procureur de Paris » (lien).

  • Le Monde, « La France et le Maroc annoncent un accord sur le retour des mineurs isolés » (lien).

  • Le Figaro, « La France et le Maroc signent un accord sur les mineurs isolés » (lien).

  • Le Monde : « Deux départements d’Ile-de-France contestent un décret qui conditionne une aide financière au référencement des mineurs isolés étrangers » (lien).

  • Le Monde : « Ouvrons le débat public sur les vrais enjeux de l’accueil et de l’accompagnement des mineurs isolés étrangers » (lien).

  • Le Monde : « De Tanger à Paris, dans les pas des enfants perdus du Maroc » (lien).

  • Le Monde : « Migrants : la France a le devoir d’agir pour les mineurs isolés » (lien).

  • Le Monde : « A Paris, le parquet et la préfecture de police réaffirment leur mobilisation contre le crack » (lien).

  • Le Figaro : « Mineurs étrangers non accompagnés: en Seine-et-Marne, près de 80 % de fraudes » (lien).

  • Yabiladi : « Maroc-France : Ce que prévoit la coopération policière pour l’expulsion des mineurs isolés » (lien).

  • Jeune Afrique : « Maroc : sur quoi porte l’accord signé par Eric Dupond-Moretti et Mohamed Benabdelkader ? » (lien).

  • Le Point : « À Bordeaux, ces « mineurs » isolés qui inquiètent » (lien).

  • Le Point : « Délinquance des mineurs : « Notre affaire à tous » » (lien).

  • La Dépêche : « En 2020, toujours moins de mineurs non accompagnés accueillis » (lien).

  • Dalloz Actu : « Création du fichier des mineurs non accompagnés » (lien).

  • Dalloz Actu : « Refus de prise en charge d’un mineur isolé étranger » (lien).

  • Dalloz Actu Etudiant : « Les mineurs isolés étrangers » (lien).

  • Dalloz Actu Etudiant : « Mineur non accompagné : les contours de la preuve de la minorité » (lien).

  • Libération : « La délinquance des mineurs est-elle stable depuis dix ans, comme le dit Eric Dupond-Moretti ? » (lien).

  • La Gazette des Communes : « La délinquance des mineurs non accompagnés nécessite une approche pluridisciplinaire » (lien).

  • Ash.tm.fr : « Délinquance des mineurs isolés : « absence de statistiques fiables » (ONPE) » (lien).

  • Journal du Dimanche : « Esther Benbassa : "En finir avec les tests osseux pour les mineurs étrangers isolés » (lien).

 

1Rapport annuel d’activité 2019, Mission mineurs non accompagnés, Ministère de la justice (direction de la protection judiciaire de la jeunesse), mai 2020 (lien)

2Ibidem.

3Voir supra (1).

4Conseil d’État, 5 février 2020, n° 428478, 428826 (lien).

5Voir le communiqué du Conseil d’État sur l’arrêt précité (lien).

6Voir supra (1).

7Voir « Action n° 8 », page 19 (lien)

8 Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), audition à l’Assemblée nationale par la mission d’information « Problématiques de sécurité associées à la présence de mineurs non accompagnés », note, 24 septembre 2020 (lien (site)).

9 Voir l’arrangement administratif (lien) et le compte rendu d’une réunion de la préfecture de police (lien).

10 Contrôleur général des lieux de privation de liberté, rapport d’activité de 2018 (lien)

11 Cour des comptes, La protection de l’enfance, une politique inadaptée au temps de l’enfant, rapport, novembre 2020 (lien).

12 Sur le projet de loi de finances pour 2020 : Solidarité, insertion et égalité des chances, voir https://www.senat.fr/rap/a19-143-7/a19-143-79.html

13 Sur le projet de loi de finances pour 2021 : Solidarité, insertion et égalité des chances, voir http://www.senat.fr/rap/a20-141-7/a20-141-77.html.

14Sur le projet de loi de finances pour 2021 : Solidarité, insertion et égalité des chances, voir http://www.senat.fr/rap/l20-138-330/l20-138-33011.html.

15Voir supra (1).

16Voir supra (14).

17INED, Les majeurs isolés étrangers et les inégalités de prise en charge dans la protection de l’enfance en France, rapport, 2018 (lien).

18Voir supra (14).

19Pour garantir à chaque enfant les mêmes chances et les mêmes droits (lien).

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