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Pire que l'inaction, le silence de Vendôme Intimidations, menaces, pressions : UNITÉ MAGISTRATS appelle la Chancellerie à prendre ses responsabilités

Statut des Magistrats 27/11/2020

Pire que l'inaction, le silence de Vendôme Intimidations, menaces, pressions : UNITÉ MAGISTRATS appelle la Chancellerie à prendre ses responsabilités - Syndicat Unité Magistrats SNM FO

Après le Conseil Supérieur de la Magistrature qui, dans un communiqué publié le 20 novembre 2020, s'inquiétait des atteintes portées à l'indépendance de l'autorité judiciaire par les mises en cause récentes de certains magistrats instructeurs, c'est au tour de Stéphane NOEL, président du Tribunal judiciaire de PARIS, de dénoncer dans un entretien au « Nouvel observateur » du 24 novembre 2020 la violence et la récurrence des attaques faites aux juges chargés des affaires politico-financières et l'« abandon » corrélatif des institutions. Le terme n’est pas trop fort pour décrire la réalité de ces magistrats qui, systématiquement ciblés lorsque les procédures dont ils ont la charge revêtent des enjeux importants, ne sont pas protégés par leur Ministère des actes d’intimidation dont ils font l’objet, ceci alors même qu’il leur est fait interdiction d’y répondre publiquement.


Le constat n’est pas nouveau : en 2014, le Ministère de la justice avait confié à la DACG, la DACS et la DSJ la mission de conduire un groupe de travail « chargé de réfléchir aux moyens d’améliorer la prise en charge des magistrats victimes de menaces et de tentatives de déstabilisation », s’agissant en particulier des magistrats spécialisés en matière de criminalité organisée et terrorisme.


Le rapport, rendu le 28 juin 2016, mettait en exergue une multiplication des atteintes graves portées aux magistrats (en particulier au vu du nombre d’enquêtes suivies du chef d’association de malfaiteurs en vue de commettre un assassinat), doublée d’une montée en puissance de tentatives de déstabilisation prenant la forme de dépôts de plaintes à l’encontre des magistrats et de campagnes médiatiques.


Face à l’aggravation des risques encourus, ce groupe de travail avait émis plusieurs recommandations parmi lesquelles :


• Adapter les effectifs afin de favoriser une collégialité réelle à tous les actes de la procédure ;
• Faciliter la mise en œuvre immédiate de la protection statutaire à laquelle ont droit les magistrats en cas de menaces ou d’attaques en créant un espace dédié, visible et directement accessible, sur le site intranet de la DSJ précisant les conditions et les modalités d’octroi de la protection fonctionnelle et les prestations auxquelles elle ouvre droit ;
• Informer les magistrats des mesures de protection policière dont ils peuvent bénéficier : protection rapprochée, communication d’un numéro dédié au sein du commissariat le plus proche, priorisation du numéro du magistrat concerné en cas d’appel au 17, prise de contact fréquente réalisée par un OPJ, mise en place de rondes aux abords du domicile du magistrat ;
• Rappeler aux chefs de Cour et de juridiction la nécessité de mener des actions de communication – avec l’appui en tant que de besoin du pôle communication de la DSJ – en réaction à des critiques ciblées contre un magistrat ou le déroulement d’une procédure ;
• Rappeler par voie de circulaire aux chefs de Cour et de juridiction leur obligation de répondre aux attaques portées à l’encontre des magistrats placés sous leur responsabilité en prenant notamment l’initiative des mesures utiles (ouverture d’une enquête pénale, mise en place d’une protection policière) sans les subordonner à une demande du magistrat concerné.


Force est de constater que, quatre ans après, aucune de ces recommandations n’a été mise en place !


Le 2 novembre 2020, suite à l’assassinat du professeur Samuel PATY, le gouvernement a pris une circulaire afin de « renforcer la protection des agents publics face aux attaques dont ils font l’objet dans le cadre de leurs fonctions ». Celle-ci, signée notamment du Garde des Sceaux, n’a semble-t-il pas été diffusée aux Chefs de cour et de juridiction. Or, elle rappelle l’obligation primordiale incombant à l’employeur public d’apporter un soutien renforcé et systématique aux agents ciblés par des menaces ou des attaques au point de préconiser l’engagement de poursuites disciplinaires à l’encontre des responsables hiérarchiques qui auraient manifesté une carence ou une négligence délibérée révélant notamment leur volonté d’occulter ou de minimiser les faits. Cette circulaire recommandait à nouveau de :
• Favoriser l’octroi immédiat de la protection statutaire aux agents victimes ;
• En cas de diffamation, de menace ou d’injure véhiculée sur les réseaux sociaux, d’user de son droit de réponse ou de rectification en publiant un communiqué tout en signalant parallèlement les propos tenus sur la plate-forme PHAROS et à l’hébergeur ou au fournisseur d’accès concerné ;
• Mettre en place un dispositif d’orientation, de conseil et d’accompagnement des agents victimes.


Plus récemment, le projet de loi confortant les principes républicains entend créer un délit réprimant de 5 ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende le fait de révéler, diffuser ou transmettre des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans le but de l'exposer, elle ou les membres de sa famille, à un risque immédiat d'atteinte à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique, ou aux biens.


Mais légiférer n'a de sens que si cela s'accompagne d'une réelle volonté politique de l'État d'assister ses agents. Or, on peut s'étonner que cela soit plutôt l'inverse : alors que les magistrats subissent des attaques incessantes, ils sont par ailleurs privés du soutien de leur Garde des Sceaux qui, plutôt que d'assurer de manière concrète leur protection, les fragilise davantage en recherchant avant tout leur mise en cause disciplinaire.


UNITÉ MAGISTRATS appelle en conséquence la Chancellerie à mettre en pratique de manière urgente les recommandations qu’elle a elle-même édictées ces dernières années afin d’assurer aux magistrats la protection qu’il leur est due.

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